ב''ה
שנה טובה
Chana tova, Bonne année !
אָבִינוּ מַלְכֵּנוּ
Avinou, Malkénou[1], Notre Père, notre Roi…
Pour mieux comprendre Celui que nous appelons "Notre Père", nous devons comparer la fonction de notre Unique Créateur avec les rôles de Ses mandataires, nos deux Procréateurs.
"Faisons l'homme בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ à notre image, comme notre ressemblance", dit la Tora. D'accord, Voltaire, "nous le lui avons bien rendu". Si nos représentations anthropomorphiques sont utiles, elles ne doivent pas devenir des pièges.
La Tora accepte ce risque, "elle parle[2] le langage des hommes", du "doigt de D.ieu", de "son bras étendu", de "sa main", et annonce que "ses pieds se poseront…" etc.
Michel-Ange dans sa fresque du plafond de la Chapelle Sixtine (1512) illustre la conception la plus courante de "Notre Père" :
la créature d’un côté face au créateur de l’autre.
L'artiste est immense, mais sa théologie n'est rien d'autre que païenne gréco-latine. Elle réduit le Créateur à un procréateur surhumain, et fatalement, elle inspire subliminalement les idées de tous. N'oublions jamais que le mot français "Dieu" vient de "Deus" et du "Zeus" grec. Nous utilisons certes le mot "D.ieu" pour être compris, mais nous en changeons l'écriture afin de nous souvenir que Celui de la Tora n'est pas ce faux dieu païen.
La réflexion sur notre Père céleste doit se tenir en terrain hébreu en tenant compte de ce que :
· rien n'existe en dehors de D.ieu, puisque Il est partout, à l’infini,
· donc que l'univers n'a pu sortir hors de Lui.
La seule image qui vient à Rabbi Yits’haq Louria (1534-1572), c'est que le Créateur, qui n'a pas fait sortir l'univers de Lui-Même vers un dehors qui n’existe pas, s'est retiré un peu en Lui-Même, par צִמְצֻם (tsimsoum), contraction. Et c'est dans ce creux ménagé en Lui qu’Il a créé l'univers.
D.ieu nous aime et les êtres qu'Il crée sont semblables à Lui, capables d'aimer. Comme on ne force pas l’amour, alors Il nous laisse libres de choisir entre notre bon et notre mauvais penchant. Il va jusqu'à renoncer –provisoirement- à régner en tout lieu. De là découle la terrifiante existence du mal, contrepartie de ce qu'est Son Amour vrai.
Ce creux aménagé par D.ieu en Son sein est l'image de la liberté humaine. C’est là que se trouve le monde, c’est du milieu de Lui-Même que D.ieu a "disparu". Le mot עוֹלָם (‘ôlam) traduit par "univers" et "éternité" nous l'enseigne, sa racine veut dire "disparaître, se cacher".
En principe[3], ici et durant le temps de Sa patience et de la gestation de l’humanité nouvelle, D.ieu disparaît et laisse chacun(e) faire ce qu'il veut. Seule la Tora en hébreu nous révèle qu'Il se cache ici mais qu'Il est partout.
Ce n’est pas qu'une théorie philosophique, voyons-en les conséquences très pratiques :
Que vous évoque l’image du monde placé dans une sorte de poche qu’a ménagée le D.ieu infini à l’intérieur de Lui-Même ? Une image inverse de celle de Michel Ange, où l'homme est face à D.ieu. Le Créateur est comme une mère qui fait de la place en elle-même pour y installer un autre être, à qui elle donne la vie ; c’est pour cela que l'hébreu de la Tora parle de רַחֲמִים[4] (ra’hamim’), ce qu'André Chouraqui traduit littéralement par "matrices", alors que les autres écrivent "compassion" ou "miséricorde".
Un anthropomorphisme de plus, direz-vous… Bien sûr, mais s'il "parle" mieux du réel ?...
Si vous voulez savoir où en est la grossesse, regardez du côté d'IsraEl. La gestation approche du terme, nous en sommes aux douleurs. Comme le dit le Rav Kook, ce ne sont pas celles de l’agonie mais de l’accouchement, pour un reste d'humanité que l'Eternel Se prépare. Il commence dans Son peuple et par Son Pays[5]. Enfin va apparaître l’humanité conforme à l’image divine, et on verra ce qu’était l’embryon :
· A-t-il choisi d’aimer ? Il naîtra viable au sein de la famille divine, comme fils ou fille du D.ieu Vivant,
· A-t-il préféré son ego ? Il n’aura rien fait pour naître viable. Il sera mort-né.
Ceci, c’est pour le point de vue éthique[6].
L’autre aspect de l’image de Rabbi Louria est sécuritaire. Nous sommes en Lui, sous contrôle. Quoi qu’il arrive, si je vis de la vie divine, aucun mal n’est irrémédiable. Même si je subis des épreuves, même si mon enveloppe est détruite, le souffle de vie divine qui m'anime ne peut être anéanti. D.ieu me rendra la vie, et cette fois je ne subirai plus d’atteinte.
C’est dans ce sens que nous vivons dans une totale sécurité, ici en IsraEl, dans les années actuelles où nous sommes submergés par des flots de haine. Car l'Eternel contrôle tout et c’est même Lui qui organise le piège… dont nous sommes l'appât :
"Je ferai de Yérouchalaïm une coupe donnant le vertige à tous les peuples d’alentour… une pierre lourde à soulever pour toutes les nations…" (Zacharie 12).
"En ces jours-là et en ce temps-là où Je rétablirai les captifs de Yéhouda et de Yérouchalaïm, Je rassemblerai toutes les nations, et Je les ferai descendre dans la vallée de 'L’Eternel-Juge', et là J’entrerai en jugement avec elles au sujet de Mon peuple et de Mon héritage, IsraEl, qu’elles ont dispersé parmi les nations ; et elles ont partagé Mon pays…" (Joël 4 : 1-2 ou 3 : 6-8)
"Lorsque j’erre, Toi ! Lorsque je médite, Toi !
Seulement Toi, encore Toi, toujours Toi !
Toi ! Toi ! Toi !
Lorsque je me réjouis, lorsque je m’attriste, Toi ! Seulement Toi, encore Toi, toujours Toi !
Toi ! Toi ! Toi !
Tu es le Ciel ! Tu es la Terre !
Toi dessus ! Toi dessous !
Dans chaque direction, à chaque issue !
Seulement Toi, encore Toi, toujours Toi !
Toi ! Toi ! Toi !"
Rabbi Lévi Yits’haq de Berditchev
La Tora va très loin pour fonder notre certitude : si nous vivons de la vie de D.ieu (dans Son amour, et que notre comportement le reflète), alors elle dit quenous sommes une part de Lui[7].
Le Rav Dufour[8] relève dans le dernier chant de Moïse (Deutéronome 32 : 9, Ha'âzinou) :
חֵלֶק יהוה עַמּוֹ (‘hélèq HaChèm ‘âmmo). Le premier niveau de traduction est valable : "la part de l’Éternel est son peuple", c'est-à-dire qu'Il s'est réservé IsraEl comme "une part pour lui et pas pour les autres".
Mais la grammaire nous invite à aller plus profond. Comme חֵלֶק (‘héléq = part) n’est pas précédé de l’article défini, au lieu de "la part", on traduit "une part" : IsraEl est donc une part de D.ieu.
C'est pour cela que nous écrivons "IsraEl", avec la majuscule de El (Dieu en hébreu) au milieu de notre nom, pour préciser que sans El, Isra… rien.
HaChèm dit au verset suivant (Deut. 32 : 10) qu’Il nous garde "comme la prunelle de Son œil" ; et Zacharie (3 : 8) "Celui qui vous touche, touche la prunelle de son œil."
C'est tellement incroyable, qu'Isaïe (26 : 19) confirme à un degré inimaginable l’union de D.ieu avec ceux qu’Il aime / avec ceux qui L’aiment (corrigez les traducteurs imprécis, limités, infidèles ou timorés) :
"Ils vivront tes morts, נְבֵלָתִי (névélati) mon cadavre, ils se lèveront, éveillez-vous et chantez de joie, vous qui résidez dans la poussière, car rosée de lumières est ta rosée, et la terre jettera dehors les trépassés".
Les morts d'IsraEl sont… "le cadavre de D.ieu". Et bien que la nation d'IsraEl soit menacée d'extermination nucléaire dans la passivité générale, nous seuls détenons la certitude de survie (pas comme d'autres peuples et pays que vous connaissez).
Le prophète Osée (13 :14) en atteste : "De la main du chéol Je les rachèterai, de la mort Je les délivrerai, où est ta peste, mort, où est ton fléau, chéol…"
Conclusion : il est temps que tout être humain connaisse l’intelligence, la puissance et l’amour du Créateur. Nous les constatons dans la nature vierge, là où la rébellion du mal n’a pas opéré de destructions.
Le projet divin initial se réalisera : "Si je mène une femme jusqu'au terme de sa grossesse, demande l’Éternel, vais-je empêcher l'enfant de naître ? Si c'est moi qui prépare une naissance, dit ton D.ieu, ce n'est pas pour la rendre impossible !" (Isaïe 66 : 9)
Et pourtant, malgré cette allusion supplémentaire, nous ne prions pas "notre Mère qui es aux cieux". Pourquoi ?
Si IsraEl préfère appeler D.ieu "Père" plutôt que "Mère", ce n'est pas parce que nous en sommes encore au modèle patriarcal machiste oppresseur des femmes.
C'est plutôt parce que la relation d'un père à son enfant tient à un lien de parole, à un pacte qui est fait entre un homme -la plupart du temps le géniteur- et son enfant. Ce lien de parole est signifié pour l'Hébreu par בְּרִית מִילָה l'Alliance de la מִילָה Mila. Cet homonyme hébreu signifie à la fois "circoncision" et "mot". Nous entrons dans l'Alliance, non déjà à la sortie de la Mère, mais seulement au 8ème jour, au mot du Père.
Qu'il soit le géniteur ou non, il y a toujours dans la paternité quelque chose de l'adoption. On est toujours sûr de l'identité de la mère (sauf dans le cas d'une mère porteuse) : c'est observable au moment de l'accouchement. Mais il peut y avoir doute sur celle du père. Notre père est l'homme désigné comme tel par notre mère. C'est une question de confiance, une question de parole donnée.
Tu n'hérites pas de ta relation avec D.ieu par tes gênes, ton sang ou ta naissance, ni même par l'éducation reçue.
D.ieu n'est ton Père que si tu L'appelles par ce nom, si tu Le reconnais comme tel. Es-tu prêt(e) à entrer en dialogue avec Lui dans une relation de confiance ? Adresse-toi à Lui et dis אָבִינוּ "Notre Père". C'est alors que ta façon de Le considérer va changer.
Vois plutôt tout ce à quoi tu es appelé(e) par le fait de n'être pas "naturellement" relié(e) à Lui, dès la naissance, par on ne sait quel cordon ombilical spirituel. Tu as à entrer en contact, tu as à tisser avec Lui une trame, une histoire commune, tu as à recevoir tendresse et protection en même temps.
Tu as aussi à montrer du respect envers Celui qui garde autorité sur ton existence, tu es appelé(e) à la reconnaissance pour Celui qui pourvoit à tes besoins alors que tu n'es pas capable de vraiment vivre par toi-même. D'ailleurs Il est d'accord pour que tu Lui en fasses chaque jour la liste…
Réalisons-nous la chance qui est la nôtre ? Nous pouvons nommer le Créateur de l'Univers אָבִינוּ "notre Père" ! Peu de croyants ont cette chance sur cette terre, en particulier les mahométans.
Mais de plus, le nom hébreuאָב (av) = "père" réserve des surprises : si "Maman" est le premier mot que j'ai prononcé,אָב (av) est composé des deux premières lettres, et de ce fait, c'est le premier mot du dictionnaire. Ensuite il s'écrit comme אֵב (èv) = "jeune pousse". Les deux mots ont pour racine trilittère communeאבב = "faire pousser". Le père hébreu se définit comme celui qui fait grandir les jeunes pousses.
Un des dérivés les plus connus de la même racine est אָבִיב (aviv), la saison des jeunes pousses, le printemps, le "temps de notre libération de l'esclavage d'Egypte" (Exode 13 : 4). Pensez-y en arrivant à l'aéroport deתֵל אָבִיב (Tel-Aviv), la Colline du Printemps.
Un autre dérivé sur lequel nous reviendrons : "Pauvres" se dit אֶבְיוֹנִים (évionim, Ebionites), comme les jeunes pousses qui peinent à grandir.
Si l'hébreu relie par la racine (!) אָב (av) le "père" et אֵב (èv) la "jeune pousse", c'est pour rappeler[9] que chaque père humain, à l'image de son Père céleste, doit prendre soin des petits et ceux-ci lui en témoigner de la reconnaissance.
En prononçant ce nom de "Père" à l'attention de D.ieu, mesure aussi le bonheur d'être riche d'autant de frères et de sœurs. Tu n'es pas seul(e). Un(e) inconnu(e) vient vers toi, il n'est pas un ennemi, vous appartenez à la même famille, ton Père te l'envoie.
Notre D.ieu et Père veut que Ses enfants vivent ensemble sans se diviser pour des questions de religions et d'idéologies. Le projet divin avec toutes les nations est fondé sur l'alliance de Noé. D.ieu lui ordonne de ne pas consommer de sang, symbole de la vie à respecter. Par cette alliance, chaque être humain peut être fils et fille de D.ieu.
L'alliance de l'église avec l'empire au 4ème siècle a interdit IsraEl de parole. Les Juifs se sont alors repliés sur eux-mêmes. Mais ce temps se termine.
L'Eternel ressuscite IsraEl. Jamais autant de non-Juifs ne sont retournés à leur vraie Source. "C'est de Sion que sortira l'Enseignement et la Parole de l'Eternel de Jérusalem." (Isaïe 2 : 3). "Dix hommes de toutes les langues des nations saisiront, oui saisiront le coin du vêtement d'un homme juif, en disant 'Nous voulons aller avec vous, car nous avons entendu dire que Dieu est avec vous.'" (Zacharie 8 : 23)
Quelle place tient aujourd'hui IsraEl parmi les enfants de Noé ? Afin de transmettre Son message, l'Eternel, D.ieu d'ordre, déclare IsraEl "Mon fils premier né"[10]. Loin d'être du chouchoutage ou de "l'orgueil de race", cette responsabilité nous a valu depuis Pharaon une cascade de souffrances et de jalousies mal placées, à chaque génération.
Vous-même n'êtes pas juif ? Prenez-vous conscience que la révélation biblique est inséparable de la mentalité et du contexte hébreux ? Sortez de la routine bimillénaire, venez vous rafraîchir à la Source hébraïque.
A Kippour comme à Roch haChana, nous célébrons notreמֶלֶךְ (Mélékh) notre Roi. Que veut dire מֶלֶךְ selon le Rav Shimshon Raphael Hirsch ?
- מֶלֶךְ (Mélékh) Roi débute avec מ. Cette lettre est en hébreu la particule qui indique l'origine. Nous venons DE Lui.
- Le centre de מֶלֶךְ est ל. C'est la particule qui indique la destination. Nous allons VERS Lui.
- מֶלֶךְ (Mélékh) Roi s'achève par כ. Cette particule exprime la comparaison. N'aspirons qu'à être COMME Lui, à faire Sa volonté dans notre vie.
Pour l'année 5773, c'est notre programme en trois lettres et c'est celui que nous vous souhaitons.
1. מ Que tout en nous vienne DE notre Roi,
2. ל que toutes les ressources qu'Il nous donne soient pour Lui, VERS notre Roi,
3. כ et qu'en tout ce que nous deviendrons cette année, nous participions au projet de notre Roi : "Faisons l'homme בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ à notre image, COMME notre ressemblance."
La distance entre vous et nous a diminué. Grâce à Internet et à Skype[11], étudiez avec nous l'hébreu chez vous sans vous déplacer, à vos rythme et niveau personnels, en leçons particulières. La langue originale du message divin peut seule vous révéler les richesses et la simplicité de celui-ci. Elle vous permettra d'en finir avec les fausses traductions bibliques et les fausses doctrines.
Cette année 5773 nous approche de la Délivrance. Abrège le temps אָבִינוּ מַלְכֵּנוּ Avinou, Malkénou, Notre Père, notre Roi…
[1] "Avinou, Malkénou, Notre Père, notre Roi" est la prière des 10 jours de Roch haChana à Kippour.
[2] Talmud, Zereâïm 31b
וְאֵל שַׁדַּי יִתֵּן לָכֶם רַחֲמִים
Cela est traduit par "Que le D.ieu Tout-Puissant vous fasse trouver compassion". Or dans ce verset, vous avez רַחֲמִים (ra'hamim) = matrices (compassion) et שַׁדַּי אֵל, El Chaddaï. אֵל (El) = "D.ieu" et שַׁדַּי (Chaddaï) veut dire à la fois "mes seins" et "celui qui dit 'cela suffit'". Cela ne vous donne pas envie de lire la Bible en Version Originale ?
[5] "Mon Pays" dit D.ieu à propos d'IsraEl, dans Isaïe 14 : 25, Jérémie 2 : 7 et 16 : 18, Ezéchiel 36 : 5, 38 : 16, Joël 1 : 6 et 4 : 2.
[6] Cette image a le mérite de représenter la petitesse de l'univers et de l'humanité AU SEIN DE l'Eternel dans Son infinitude. On ne peut même pas dire "par rapport à"…
[8] Sur modia.org, voir aussi l’enseignement du Rav Horowitz dans Apprends-nous à compter nos jours n°1 p. 37-38.
[9] C'est le message d'Elie annonçant le Messie, voir le dernier verset de Malakhi : ramener le coeur des pères vers les fils et celui des fils vers les pères.
[10] Exode 4 : 22
[11] Contactez nous pour toutes précisions. Skype est un logiciel gratuit qui, grâce à une webcam, permet de communiquer gratuitement d'ordinateur à ordinateur. Cliquez :
http://www.skype.com/intl/fr/get-skype/
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